(Première publication sur sknob’s other Posterous).
L’artiste perçoit le monde qui l’entoure et le retranscrit, ou retranscrit les émotions que ce monde suscite en lui, dans ses œuvres.
L’artiste a cette faculté de percevoir les choses ou les sentiments que ses contemporains ne perçoivent pas, ou ne perçoivent plus.
L’artiste a souvent la faiblesse de penser que cette incapacité à percevoir est un malheureux handicap, et qu’en aidant ses contemporains à le vaincre, il commet une bonne action.
L’artiste se goure.
Les gens ne tolèrent que l’artiste qui se borne à décorer agréablement le temps qui passe.
Les gens ne souffrent pas d’un handicap. Ils ont fait un choix.
Les bornes, les repères, les modèles bien définis sont autant de structures rassurantes (qui de l’artiste ou des gens est le véritable enfant ?). Quand l’artiste dynamite ces structures, les gens ne le prennent pas bien du tout.
Les gens se sont en effet construit ou choisi (ou ont reçu en héritage) un ensemble de valeurs, de comportements et de représentations du monde.
Les gens tendent ensuite à conforter ces valeurs et représentations en ne fréquentant que des gens qui les partagent, au sein de structures organisées pour ce faire (clubs, associations, partis politiques, syndicats, entreprises, Facebook, Siècle, Bildeberg, Davos, etc.).
L’artiste constate que le comportement des gens conduit le monde à la faillite (écologique, énergétique, économique, démocratique) ?
Plutôt que de modifier leurs comportements, les gens déforment leur perception du monde extérieur pour la conformer aux valeurs et convictions qui sous-tendent les mondes artificiels qu’ils habitent.
Car alors que l’artiste révèle le monde extérieur en le réinterprétant dans son imaginaire puis dans son œuvre, l’œuvre des gens (le monde caricatural et illusoire qui conforte leurs préjugés) est la négation du monde extérieur.
C’est la démarche exactement inverse.
Laquelle est la plus constructive ?